Les baleines  

Mardi 18 juin.

Nous quittons le hytter de bonne heure car nous avons 53 km à parcourir pour prendre le bateau. Cela paraît peu sur une carte mais en Norvège, même si les routes sont belles, les voitures roulent lentement : civisme, amendes très lourdes, essence chère et prudence sont les ingrédients de la sécurité routière de ce pays. Nous avons réservé quatre places pour un safari baleines. Avec nous, Moby dick n’a plus qu’à bien se tenir !
Le guide nous fait un briefing en salle de projection avant de prendre la mer. La région d’Andenes est privilégiée à cause de la présence du « canyon de Breiz », une vallée engloutie où les eaux froides de l’Arctique passent sous la fin du Gulf Stream. La nourriture y est abondante alors les cachalots se regroupent à cet endroit précis, invisible depuis la surface.

Le bateau commence par un arrêt près d’une réserve ornithologique au large de Stø où une colonie de 17.000 macareux nous attend. Nous y voyons aussi une foule d’autres oiseaux : guillemots à miroir et guillemots de troil, pingouins Torda et petits pingouins, cormorans, même si « l’oiseau clown » est le roi du spectacle. Au détour d’un rocher, trois oiseaux bizarres. Le guide est aux anges : la présence d’Hareldes boréales à cette époque est exceptionnelle. Sur un rocher, deux splendides pygargues à queue blanche se laissent photographier avant de s’envoler un peu plus loin.

  

Nous quittons la réserve sous le regard attentif de deux phoques, une mère et son petit, et nous longeons la côte pendant 2h30 pour rejoindre le canyon. Les gens mangent, boivent du thé, se promènent sur le bateau, profitent du soleil. Il y en a même un qui sort Cléopâtre de sa poche pour la photographier.

Sur place, c’est l’angoisse : sortira, sortira pas ?
Les guides ont entendu un cachalot au sonar, le même qu’ils viennent montrer chaque jour. Le chant s’est arrêté, signe qu’il va remonter mais les minutes passent et pas de souffle à l’horizon. Le chant reprend puis s’arrête à nouveau. L’attente dure 1h30, en vain. Il peut rester 2h en apnée, mais quand même ! Tous les visages sont moroses : les touristes craignent de rentrer bredouilles et les guides de devoir rembourser la sortie … Soudain, le capitaine relance le moteur. Un guide a aperçu des ailerons d’orques !

Adieu Moby Dick, bonjour Willy. Nous les rattrapons vite et pendant près d’une heure, dans un silence respectueux à peine troublé par les appareils photo déclenchés en rafale, nous suivons le ballet d’une quinzaine d’orques, les baleines tueuses. Il y a au moins trois mâles adultes, reconnaissables à leur aileron très droit, des femelles et des jeunes. Nous entendons leur souffle à chaque respiration ! L’instant est magique, comme à Tadussac il y a déjà 10 ans.

Et c’est le retour, plus long que prévu bien sûr, puisque les orques nous ont emmenés loin du canyon en haute mer. Nous scrutons l’horizon au cas où le cachalot se montrerait mais il a du profiter de notre escapade à la poursuite des orques pour remonter prendre sa respiration et replonger vers sa cantine habituelle. Plus rien ne troublera donc la sortie en mer. Tout le monde déserte peu à peu le pont. Il fait meilleur à l’intérieur et une bonne soupe de poissons est servie … A toutes les tables, chacun regarde ses photos ou son film, qui sur l’écran de l’APN, qui sur son i-phone, qui encore sur son i-pad. Et sur tous les visages, ce même sourire heureux de ceux qui viennent de vivre un grand moment. La sortie aura duré 9 heures en tout !

De retour sur la terre ferme, il faut maintenant gagner notre prochaine étape … à 140 km de là, ce qui veut dire au moins 3 h de route. L’endroit est magnifique, comme toujours. Et comme toujours, il est différent des autres étapes. Pour le confort, c’est assez spartiate : des petits bungalows pour deux, une « cuisine » commune et des douches communes. Pas de vaisselle à notre disposition et la « cuisine » n’est en fait qu’un sanitaire un peu amélioré pour faire la vaisselle, avec deux tables et six chaises. Mais bon, c’est un camping norvégien typique.

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